iPagina’Son ou la lecture d’une correspondance…
Votre lectrice du jour : Sortilège
Une partie de l’article publié aujourd’hui n’est pas de moi, mais de Malayalam, conseiller sur ipagination. Pourquoi être redondant, alors que chaque mot, chaque phrase, résument parfaitement l’émotion et l’intensité de la correspondance entre Marie-Magdeine à son retour des camps de concentration et son époux médecin.
Mamagly75, détentrice de cette correspondance d’une force incroyable, a choisi de la publier sur iPagination. Un partage formidable…
Voici l’article accompagnant un des coups de coeur de Malayalam d’Octobre 2015, lue avec toute l’émotion retenue qui caractérise Sortilège.
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» Partager l’écriture d’une auteure qui a rejoint le paradis des écrivains en laissant derrière elle l’ensemble de ses textes et de sa correspondance avec son cher époux, c’est ce que nous propose Mamagly 75 depuis quelques semaines.
J’ai découvert avec émotion cette écriture qui garde fraîcheur, modernité et grande authenticité. De l’ensemble des textes postés, j’ai choisi de mettre en évidence ce poème au contenu terrible d’intensité dans la douleur liée à l’expérience impossible à effacer de la déportation.
Ces quelques mots de Mamagly pour vous permettre de comprendre de quel vécu ce texte fort, magnifique de justesse, est né.
Quelques semaines avant la libération, Benjamine (non de résistante) a 20 ans et fut arrêtée sur le pont Neuf à Paris! Déportée avec d’autres, tels des animaux…Benjamine arriva à Ravensbruck… puis quelques mois plus tard partit sur Koenigsberg sur Oder…. Libérée par les Russes de Joukov en 1945, elle revint sur Paris, s’en suit une longue correspondance avec son amour… »
PAROLES D’UNE FOLLE – 1947
Le silence a parfois cette odeur
de mort qui règne dans les pièces
désolées où seule l’ombre d’un jadis
erre éperdument.
La tristesse est son amie chère
et ne le quitte jamais, ils se posent
tous deux sur les épaules fatiguées
de celle qui attend un fantôme,
le fantôme de ses défuntes années.
La joie s’est retirée comme l’eau
de la mer s’en va sur la plage
ensoleillée et comme les nuages
arrivent sur la lumière pour la cacher.
Il ne reste qu’un creux, un vide
béant ou se cache le silence.
La femme assise n’est pas vivante. Enfuie
dans son passé, elle n’existe plus
à l’intant présent.
Tout est vide et béant avec
cette odeur de morgue.
Pour briser ce silence, il faudrait
tuer la femme, et pour oter l’odeur
rendre la lumière.
J‘ai voulu tuer la femme
afin que renaisse la vie
J‘ai vu la femme se lever
à mon approche, apeurée et s’avançant
toujours vers la mort que je tenais
dans la main – Alors bravement
pour en finir plus vite,
en fermant les yeux, je me suis
ruée sur Elle le couteau levé.
Le couteau est entré, brisant
la vitre de son coeur, j’ai senti
les éclats tomber sur mes pieds
rompant tout le silence.
J‘ai hurlé de joie, le silence était
tué, et j’ai osé enfin ouvrir les yeux.
C’est alors que j’ai vu
la lance plantée dans la glace
et mon image en face…
Je m’étais tuée…
Alors la nuit a tout envahi.
Il n’y aurait plus d’ombre ni de
silence, plus de femme non plus…
Tout est mort… à quoi bon attendre,
à quoi attendre que la mort à
son tour ensevelisse la mort….
De Benjamine à Mali, moi, Marie-Magdeleine !
©All rights reserved Magmaly, 1947 Paroles d’une Folle « je M’étais Tuée »
*Let 385-386
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